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La Husqvarna 900 Nuda est la toute première machine routière née suite au rachat de la marque par le groupe BMW. S'il est logique d'y trouver nombre d'éléments communs avec les cousines germaines F 800 R et F 800 GS, la Nuda n'en demeure pas moins une nouveauté à part entière. C'est en Sardaigne, sur route et sur piste, que nous sommes partis à la découverte des deux modèles, la Nuda 900 et la Nuda 900 R. Autant le dire tout de suite, ces deux machines sont du genre turbulentes !
Il est tout d'abord bien difficile, esthétiquement parlant, de classifier la Nuda. S'agit-il d'un supermotard, ce que sa hauteur de selle conséquente et son guidon large laissent suggérer ? Ou bien appartient-elle plutôt à la catégorie roadster, comme en témoigne justement la distance assez grande entre ce guidon et cette selle ? Nous allons voir qu'à l'usage, nous ne cesserons de nous poser la question. En fait, elle est un peu des deux, mais elle est surtout une véritable « fun bike ».
Look et finition
Quoi qu'il en soit, la Nuda possède une vraie gueule. On aimera ou on détestera, mais ses lignes anguleuses et tranchantes ne laisseront personne indifférent. Le réservoir et ses écopes, vus de dessus, arborent ainsi une forme en V bien nette, la coque arrière est ultra fine tandis que le phare est surmonté d'une plaque sur laquelle on aura probablement envie de coller un numéro. Encore plus inédite, pour ne pas dire spéciale, est la forme du garde-bout avant : les designers maison ne doivent pas boire que de l'eau ! En revanche, on aurait aimé qu'ils soient plus inspirés pour dissimuler la batterie ou encore les durits du radiateur de refroidissement. Il n'en demeure pas moins que la moto affiche une bonne finition, à l'image du guidon à diamètre différencié monté sur de solides pontets en aluminium, du système de réglage de la tension de chaîne par platines poussées ou encore du tableau à la fois ultra compact et ultra riche en informations. Quant à la version R, elle se distingue - hormis ses suspensions et son freinage spécifiques - par quelques touches de carbone sur le silencieux et une peinture tricolore rouge, noire et blanche.
En selle
Notre machine d'essai est la version « touring », c'est à dire qu'elle reçoit une paire de valises étanches et à volume variable ainsi qu'une bulle surmontant la plaque du phare. A l'usage, cette dernière montrera une efficacité suffisante pour supporter un bon 130-140 km/h de croisière. Au delà, ce sera plus rude. Rude est aussi le terme qui convient pour qualifier le confort de la selle, taillée dans un bloc de « mousse en béton » ! Une remarque que nous ne manquerons pas de faire aux responsables de la marque, ces derniers nous prouvant l'après-midi même qu'ils nous écoutent en nous annonçant l'arrivée prochaine (en option) d'une selle au gel. Si cela n'est pas faire preuve de réactivité... En selle, donc, on est perché à 870 mm du sol (860 mm en option), ce qui place les pilotes d'une taille égale à 1,75 m sur la pointe des pieds. Heureusement que la machine est légère. La position de conduite est quasi « unique » en ce sens où la forme de la selle, elle aussi en V, vous ramène systématiquement au même endroit si vous décidez de vous déplacer un peu sur l'avant ou l'arrière de la machine. Et pour corser un peu le tout, ceux qui ont pour habitude de conduire sur la pointe des pieds auront, côté gauche, le talon qui tape dans la protection de l'échappement et, côté droit, sur la platine des repose-pieds passager. Ces dernières sont cependant démontables pour qui voudra emmener la Nuda sur piste. Bref, côté ergonomie, c'est très perfectible.
Moteur jouissif
Une fois la mécanique en marche, les réjouissances commencent. La sonorité est vraiment très agréable, assez grave au ralenti et de plus en plus métallique à mesure que l'on grimpe dans les tours. Le calage particulier du vilebrequin à 315 degrés n'est évidemment pas étranger au phénomène, de même que l'augmentation de cylindrée du bloc issu de la BMW F 800 ainsi que les modifications opérées sur la distribution. Bref, on sent une mécanique à la fois gorgée de couple et dénuée d'inertie, ce qui se confirme quand on ouvre les gaz. C'est simple, la Nuda 900 « envoie » de 2 000 à 8 500 tr/min ! Et à tous ceux qui pensent qu'un bicylindre de forte cylindrée unitaire ne peut pas être souple, la Nuda prouve le contraire en reprenant sur le sixième et dernier rapport dès 2 000 tr/min sans le moindre signe de mécontentement. En ville, on se surprendra même souvent à passer la 4ème, voir la 5ème vitesse... Puis vient la partie vraiment amusante, dès 4 000 tr/min, où l'on peut alors ressortir de courbe avec force. Un léger coup d'embrayage et la machine ne sera alors jamais avare en wheelings... Dès lors, c'est le festival avec des accélérations très généreuses et une puissance qui débarque de plus en plus. En clair, la Nuda aime grimper dans les tours. Normal, avec un couple et une puissance maxi distants de seulement 1 500 tr/min. Alors on prend un malin plaisir à cravacher sur chaque rapport d'une boîte précise quoiqu'un peu ferme. Plaisir instantanément rendu par une mécanique qui ne s'essouffle jamais et qui, au contraire, en redemande. Jouissif, assurément. Et c'est d'autant plus jouissif que la partie-cycle est vraiment saine...
Terrain de jeu
Ainsi, c'est avec un acharnement certain que vous chercherez les routes sinueuses aux commandes de la Nuda 900. Pour les rejoindre, vous emprunterez tantôt l'autoroute où vous constaterez un léger louvoiement de la machine à très haute vitesse, ce qui est normal considérant le débattement important des suspensions. Rien de bien inquiétant cependant. Tantôt, vous passerez par la nationale où l'ergonomie discutable et la selle ferme vous feront raccourcir la balade et accélérer le mouvement. Dommage, car le confort des suspensions est, lui, très bon. Mais une fois à destination, et quand bien même la route sera revêtue de façon désastreuse, vous vous régalerez tant la tenue de route de la machine est impressionnante. Sauf qu'il faudra d'abord assimiler un petit mode d'emploi, celui de freiner bien en ligne puis de « jeter » la moto sur l'angle, ce que son faible poids autorise sans problème, plutôt que de freiner jusqu'à la corde du virage. Car alors, le grand débattement de la fourche, comprimée au maximum, vous fera invariablement élargir la trajectoire lorsque vous relâcherez le levier de frein. Bien sûr, il sera possible de corriger, grâce à l'agilité de l'ensemble et, là encore, grâce au faible poids. Mais comme le freinage est très puissant, il va sans dire que l'on vient sans mal en butée des 210 mm de débattement de l'avant, d'autant que la fourche ne dispose d'aucun réglage, pas même celui de la précontrainte. L'amortisseur peut quant à lui être ajusté en précontrainte (mais le réglage est inaccessible sans outils) et en détente. A ce sujet, il faudra veiller à ne pas trop fermer cette détente, comme cela était le cas au début de notre essai, ce qui avait pour conséquence d'empêcher l'arrière de la moto de « remonter » lors des freinages et rendait les entrées en courbe nettement moins précises et bien plus physiques. C'est un phénomène très marqué sur ce genre de machine affichant une course morte relativement importante. Mais quelques clics en moins sur le coupable, tout est rentré dans l'ordre et la moto est devenue vive, précise, voir même incisive. Et autant vous dire que nous nous sommes vraiment beaucoup amusés à son guidon. Reste à vous parler de la version R, ce qui nous amène directement à notre incartade sur piste...
Pour la piste
La Nuda 900 R, c'est donc tout d'abord une fourche entièrement réglable de marque Sachs, un amortisseur Öhlins lui aussi 100 % ajustable qui permet aussi de relever de 10 mm supplémentaires l'arrière de la moto. On note aussi en plus des modifications esthétiques précédemment citées la présence d'étriers de frein avant Brembo de type monobloc et d'un pignon de sortie de boîte de vitesses comportant 16 dents au lieu de 17 sur la version classique. Ce dernier détail fait, selon le constructeur, grimper la consommation de l'ordre de 0,4 à 0,7 litres suivant les conditions d'utilisation, un paramètre que nous n'aurons hélas pas la possibilité de vérifier ni sur l'une, ni sur l'autre machine. Bref, nous voilà partis pour quelques tours d'apprentissage du circuit, l'occasion de remarquer dès le premier freinage qu'il y a beaucoup, beaucoup plus de puissance par rapport à la version normale. Peut-être trop pour un usage routier d'ailleurs et il faudra vraiment se méfier du blocage de roue, même sur sol sec, car deux galettes de 320 mm plus des étriers de ce type sont plus que déraisonnables pour stopper moins de 200 kg en ordre de marche ! Sur piste, en revanche, ce système de freinage trouve toute sa justification et, même en retardant tour après tour le moment d'attraper le levier, je freinais toujours trop tôt ! Les pneus, des Metzeler Sportec M5, sont mis à rude épreuve et, après seulement quelques tours, commencent à glisser gentiment. Le dosage de la poignée des gaz étant précis, on s'en amuse même à l'accélération tandis que certains de mes confrères, adeptes de la conduite façon supermotard, trouvent qu'ils sont « parfaits » pour entrer en courbe en glisse. Ainsi, la Nuda 900 R semble parfaitement à l'aise sur piste.
Mode d'emploi bis
Sauf qu'une fois de plus, l'ergonomie de la machine me joue des tours. Les platines qui supportent les repose-pieds passager ont certes été démontées, mais mon talon touche toujours la protection d'échappement. Du coup, dans les virages à gauche, je ne trouve pas le bon appui sur la pointe du pied et je ne suis donc pas hyper à l'aise pour déhancher. De plus, vu la hauteur de selle, il faut vraiment « sortir de la moto », sinon, c'est le repose-pieds qui vient frotter avant le genou, signe que la moto manque un peu de garde au sol. A noter que sur route, je n'ai pas rencontré ce problème, me contentant d'utiliser le bras de levier du grand guidon et le haut du buste pour aider la machine à tourner. Méthode que j'applique alors sur piste, tout en sortant la jambe pour prévenir d'une glissade. Mais là encore, la garde au sol vient à manquer et je suis finalement plus efficace en revenant à mon bon vieux déhanché. De retour dans les stands, en discutant avec les collègues, nous tombons néanmoins tous d'accord sur plusieurs points : cette moto est facile à contrôler car légère, elle pardonne pas mal d'approximations, elle reste saine en toutes circonstances et, surtout, est hyper fun à piloter. Car avec son pignon de 16, les sorties de courbe ne sont plus simplement viriles mais tout bonnement canonesques ! Si seulement son ergonomie, mélange d'un supermot' et d'un roadster (et cumulant donc les avantages et inconvénients de l'un et l'autre genre) n'était pas si perfectible...
Conclusion
Pour moins de 10 000 €, la version « classique » de l'Husqvarna Nuda 900 tombe à pic pour qui cherche une machine atypique et dotée d'un fort caractère. Car rien que pour sa mécanique pleine de patate, la Nuda mérite le détour. Ajoutez à cela la possibilité de lui adjoindre une paire de valises, choisissez l'option selle au gel (indispensable à mon avis) et vous lui pardonnerez sa position de conduite « à cheval entre les deux mondes », d'autant que vous disposerez alors d'une machine où le maître mot est le fun, ce qui n'est pas rien à notre époque un brin tristounette. Enfin, si vos moyens le permettent, vous basculerez sans hésiter du côté R de la force. Car cette dernière, à l'aise sur piste, se montrera aussi globalement plus efficace sur route ne serait-ce que par les réglages de suspensions supplémentaires qu'elle apporte. Avec elle, il faudra cependant faire très attention à son freinage, vraiment surpuissant. Quoi qu'il en soit, Husqvarna signe ici son arrivée en beauté sur le créneau des motos de route avec deux machines aussi turbulentes l'une que l'autre. On aime !
lien photos (beaucoups!)
http://www.moto-infos.com/essai-1716-husqvarna-nuda-900.html